16 juin 2017

Portrait franco-allemand / Gerhard Weber, chef du Stube

Photographie Florence Reynaud

Retour de la rubrique Interview sur Bretzel & Café Crème avec une nouvelle série de portraits franco-allemands.
Gerhard Weber, en France depuis 30 ans, et chef du restaurant allemand Le Stube à Paris nous a ouvert les portes de son établissement rue de Richelieu. Une clientèle d’habitués et de touristes se presse dans son restaurant, tant pour ses spécialités germaniques que pour son accueil chaleureux. Rencontre avec un artisan au grand cœur qui aime faire découvrir sa culture et son pays au travers de sa cuisine... Bonne lecture à tous et viel Spaβ !

Bonjour Gerhard. D’où venez-vous en Allemagne ?
Gerhard Weber : Je suis originaire de Sachsenberg, un village de 1000 habitants dans la belle région de la Hesse, au nord de Francfort. C’est une région agricole au climat relativement rude et aux paysages variés. J’aime y faire de grandes balades au milieu des forêts, de la campagne, des pâturages avec des vues imprenables sur les collines. Dans ce village, la boulangerie familiale Weber transmise, agrandie et modernisée de génération en génération est toujours en activité, dirigée par mon frère.

Quels sont vos premiers souvenirs en cuisine ?
Gerhard Weber : J’ai eu mes premiers vêtements de boulanger alors que je savais à peine marcher et il me fallait un tabouret pour atteindre le plan de travail mais quelle fierté de se lever au milieu de la nuit pour accompagner mon père au laboratoire. Mes premiers souvenirs sont associés au toucher, au pétrissage de la pâte et puis les odeurs… celle des viennoiseries encore chaudes et garnies de gelée d’abricot ou celle si caractéristique du pain de seigle à peine sorti du four.

Comment êtes-vous arrivé en France ?
Gerhard Weber : Après mon apprentissage en boulangerie de 16 à 18 ans dans la petite ville de Korbach et quelques mois dans la boulangerie familiale, je suis parti faire de la pâtisserie d’abord à Bonn (à l’époque capitale de l’Allemagne) puis à Dusseldorf chez Bittner, une pâtisserie très renommée. Connaissant mon goût pour la France, mes collègues m’ont montré une annonce parue dans un journal professionnel pour un poste à la Pâtisserie viennoise à Paris dans le 17ème arrondissement. Je suis arrivé en France en juillet 1986 pour un CDD de 6 mois.

Ce qui vous a surpris en arrivant en France ?
Gerhard Weber : Lorsque je suis arrivé à Paris, j’ai été surpris et séduit par le côté cosmopolite de la ville, cette sensation de pouvoir faire le tour du monde en une journée en restant au même endroit.

Pourquoi êtes-vous resté en France ?
Gerhard Weber : Il y avait une place à prendre dans cette affaire familiale et puis j’ai rencontré la fille de la maison, Sylvie, alors gestionnaire de l’établissement… qui est devenue ma femme. Nous avons repris le flambeau de la Pâtisserie Viennoise avant de créer une nouvelle enseigne, le Stübli, qui est vite devenu un lieu incontournable pour les amoureux de la gastronomie allemande. En 2008, nous avons cédé le Stübli et après une année sabbatique, nous avons créé un nouveau concept de gastronomie franco-allemande, le Stube installé depuis 2010 dans le 1er arrondissement à Paris.

Avez-vous eu un mentor en cuisine ? Un ouvrage de référence ?
Gerhard Weber : La période de l’apprentissage n’a pas été tendre pour moi mais j’ai appris avec chacun et je continue à apprendre encore aujourd’hui. Un geste, une attitude, l’apprentissage des techniques traditionnelles, en regardant par-dessus l’épaule des chefs des bonnes maisons parisiennes où j’effectuais les livraisons pour le compte de la pâtisserie viennoise. Mon expérience, je la dois à la somme de toutes ces rencontres franco- allemandes.
Avant de quitter l’Allemagne, j’ai reçu en cadeau un livre de cuisine de Gaston Lenôtre. Je l’ai beaucoup feuilleté… mais je n’ai jamais suivi une recette à la lettre !

Vos sources d’inspiration ? Comment créez-vous une nouvelle recette ?
Gerhard Weber : L’inspiration vient en me promenant, en goûtant, en essayant. Mon approche de la cuisine d’Europe centrale est faite d’amitiés franco-russes, de rencontres et de voyages ciblés à Vienne ou à Prague pour voir ce qui s’y passe. Tous les voyages sont source d’inspiration et me donnent de nouvelles idées. Lorsque que je crée une recette en pâtisserie, je note mes essais dans un petit cahier. Il s’agit d’une trame, ensuite je raye, je gribouille, j’annote. Et je conserve précieusement mes carnets que je ressors plus tard pour les consulter.

Quel est votre plat fétiche ?
Gerhard Weber : Ma madeleine de Proust, c’est le Armer Ritter (pain perdu en allemand) que nous préparait ma maman le mercredi midi. Ce jour-là, le déjeuner était sucré, c’était la tradition. Du pain trempé dans du lait et de l’œuf, pané puis revenu à la poêle. Accompagné d’un sabayon, c’est tout simplement divin ! Je suis également un grand fan de la pomme de terre sous toutes ses formes. Je vous conseille de gouter des pommes de terre cuites en croûte de sel et accompagnées de fromage blanc, c’est délicieux.

Une bonne adresse à Paris ?
Gerhard Weber : Nous sortons rarement au restaurant car nous apprécions de nous retrouver chez nous à la maison. Mais ce que nous aimons à Paris, c’est l’ambiance d’une brasserie ou d’un bistrot, proposant de bons produits et de la cuisine traditionnelle. J’aime bien allez chez Georges rue du Mail.

Le Stube, une ambassade culinaire ?
Gerhard Weber : En fait, il y a différentes clientèles au Stube en fonction des jours et des heures. Certains arrivent grâce au bouche à oreille, d’autres nous découvrent via les réseaux sociaux. Et les habitués du quartier se mêlent aux touristes qui, appréciant l’ambiance et la cuisine allemande, en font leur cantine le temps de leur séjour. Je propose une cuisine simple, préparée avec des ingrédients de qualité. Mon objectif est de rendre la cuisine allemande accessible et cela fonctionne, les gens ne restent pas indifférents. Un touriste m’a fait ce compliment dernièrement : « Je ne savais pas qu’on mangeait si bien en Allemagne ! »

Votre german touch ?
Gerhard Weber : Contrairement aux clichés, je ne suis pas l’exemple même de la rigueur allemande. Mais j’attache beaucoup d’importance au respect envers autrui, à l’ouverture et au sens de l’accueil. En voiture, je suis discipliné…même si j’oublie parfois les limitations de vitesse sur l’autoroute !

Votre mot préféré en allemand ?
Gerhard Weber : gemütlich. J’ai beau cherché, il n’y a pas d’équivalent en français.

Plutôt voiture ou vélo ?
Gerhard Weber : Ni voiture, ni vélo. J’adore marcher dans Paris.

Plutôt bière ou vin ?
Gerhard Weber : J’apprécie de boire une bière pendant la journée et de déguster un bon vin en soirée. J’ai appris à connaitre et à apprécier les vins depuis que j’habite en France.

Quel est votre rythme en semaine ?
Gerhard Weber : En semaine mais aussi le samedi, je suis debout de bonne heure, de très bonne heure même, autour de 4h45. Le soir, je tache d’être rentré à la maison à l’heure du diner. Cependant, chaque journée est différente et le rythme est donné par le travail.

Quel est votre rythme le week end ?
Gerhard Weber : Le week end, je me lève de bonne heure pour profiter du calme et je joue du piano. Ma journée est faite de plaisirs simples : promenade avec les chiens, un petit tour à la boulangerie où je croise les voisins. Après un déjeuner, l’après-midi s’articule entre rangement et jardinage. Le dimanche soir, nous dinons de bonne heure en famille.

Etes-vous connecté ?
Gerhard Weber : Le soir, j’utilise la tablette pour prendre connaissance des informations et pour écouter de la musique. Je me balade sur le net, casque vissé sur la tête, pour trouver des sons qui me font vibrer.

Un secret non avoué…mais avouable J ?
Gerhard Weber : Avec la musique, nous abordons un sujet sensible et un univers très personnel, univers que je partage avec les membres de ma famille. La musique provoque en moi l’évasion mais également l’émotion. La musique que je joue au piano le matin reflète complètement mon humeur. J’aime la musique classique mais j’apprécie également la musique électronique et synthétique, qui vient souvent d’Allemagne.

Et pour conclure ?
Gerhard Weber : Je suis et reste un allemand. Mais un allemand à l’aise au sein de la société française, un allemand baigné et imprégné de la culture de ce pays qui est le mien depuis 30 ans.

Mon grain de sel
La prochaine fois que vous allez au Stube, dites à Gerhard que vous venez de ma part…

Mémo en V.O. :  pain de seigle - das Roggenbrot

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2 commentaires:

ISCA a dit…

Dans celui de la rue de Richelieu ou du passage Verdeau ?

Flo Bretzel a dit…

Isabelle,
le Stube du passage Verdeau est fermé. Vous pouvez désormais retrouver le Stube rue de Richelieu et au Goethe Institut.